jeudi 1 novembre 2018

1er novembre 2018 - Budapest vol. 1

L'histoire, il me semble, c'est celle d'un crapaud qui veut paraître plus fort qu'un bœuf. Peu regardant sur la substance, il se gonfle d'air jusqu'à - je crois - éclater. C'est le propre de la vanité : se gonfler de vide pour en imposer : exposer, exploser.

C'est toute l'architecture de Budapest.

Les bâtiments sont de vastes baudruches de pierre qu'on s'attend à voir pendre, vides et molles, au lendemain de la fête. C'est chargé mais décharné, magistral sans majesté. C'est une ville dans laquelle on ne peut se blottir, hormis peut-être lorsque le bas brouillard vient en limer les arêtes, noyer les colonnes et cacher les excès. C'est un molosse pourtant tenu en laisse ferme par ses habitants, sages et nonchalants, qui en longent les façades d'un pas franc, ou dans de petits tramways jolis et robustes, et mettent ce Goliath à genoux par leur propre valeur, leur humanité sans fard et sans détour. Rares sont les villes qui se font si peu le reflet de la vie qu'elles abritent.

C'est à croire qu'à discuter chaque jour avec ces magnifiques et gigantesques bâtiments de tous âges, les âmes hongroises se sont tassées : à l'intérieur d'eux-mêmes, les gens d'ici sont plus larges que longs.

C'est étrange alors de venir ici danser, dans la ville de toutes les rigidités. Les trois péniches alignées porte à porte comme des perles sur un fil offrent un très large espace dans lequel plusieurs groupes et plusieurs DJs se succèdent pour faire swinguer, bouger, glisser les danseurs du monde entier. Je regarde les danseurs, de loin, de près, je regarde leur majesté et leur grandeur et je ne vois pas la vanité. Ils me paraissent grand dans leurs gestes, dans leurs sourires, dans leurs amitiés, dans la musique qui traverse leurs corps et les anime de l'intérieur comme la plus splendide des poupées. Je regarde autour de moi et tout est grand, véritablement grand de cette grandeur sans taille qui vient de la valeur profonde des choses. Un mouvement de hanche, des mains qui jazzent, des pieds qui twistent et le plus petit pas devient un feu d'artifice. Tout est tellement grand, et je suis toute petite.

Je suis minuscule et j'évite les pas des uns et des autres, je me fais des bleus, le visage sous leurs semelles, je tremble sans rythme et je file d'une perle à l'autre en cherchant une salle à ma taille, un lieu à ma pointure. Je ne sais que faire de ma fierté qui se traîne maladroitement derrière moi, ennuyeuse et inutile. Vide et vaine.

Quatre danses.

L'histoire ne dit pas que, pour vaniteux qu'il soit, le crapaud essaie. Qu'il s'efforce. Qu'il risque. Qu'il ne dépasse pas l'ongle du ruminant et que même là, battu par essence, il s'acharne encore. Qu'il en crève.

Littéralement. Ridiculement.

Pop.

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