dimanche 5 septembre 2010

4 et 5 septembre 2010 - New York vol.4

Hier, je me suis retrouvée sur la 72ème rue à regarder un groupe de jazz jouer en plein air. Contrebasse, guitare, batterie, trompette, j'avais l'impression d'être dans le New York que j'avais imaginé : de hauts buildings et plein de gens avec au milieu un groupe de blacks jouant du jazz. Et puis le trompettiste jouait de deux trompettes à la fois, chacune dans une main, et outre le côté spectaculaire, c'était très beau à entendre. J'ai toujours aimé la laideur travaillée des trompettistes quand ils soufflent dans leur instrument. Ils y envoient de l'air, mais aussi tout ce qui va avec : leurs lèvres, leur sang, leurs yeux. Leur souffle pousse tout leur visage avec la même force, et parfois j'ai un peu peur de voir cette tête se fendre et laisser passer tout ce qu'il y a à l'intérieur. Mais non, tout ce qu'il y a à l'intérieur va dans la trompette. Tout. Jusqu'au plus profond. Et pour le coup il ajoutait à cette forme d'intensité et de laideur celle de ses deux trompettes, qui lui donnaient l'air d'un cerbère. Et de tout cela, de cet amalgame de choses improbables, s'élevait… le jazz. A prononcer en faisant s'envoler les consonnes. Je les ai finalement abandonnés pour aller au cinéma, où la bande sonore était agrémentée des bruitages facétieux des pop-corns et des sodas. Sans parler des sonneries de portable. Comme il n'y avait de toute façon rien à voir dans ce film, je me permettais de temps à autre de jeter des coups d'œil impressionnés au récipient, que dis-je, au puits de pop-corn que mes voisins de gauche sont parvenus à terminer en un seul film (je pensais pourtant qu'une année n'y suffirait pas).



Mais pour le coup je n'avais pas mangé de la soirée, et en me réveillant ce matin j'avais une faim d'américain. Dès le réveil, j'ai décidé d'aller prendre un brunch. J'étais toute seule dans le restaurant, et la serveuse s'ennuyant un peu tenait beaucoup à me faire la causette. Mon anglais au réveil étant ce qu'il est, j'ai bien dû passer la première demi-heure à me contenter de dire “yes” si l'intonation supposait une phrase rhétorique ou polie, et “no” si ça avait l'air de concerner quelque chose de payant. C'était délicieux, mais je maintiens qu'un ventre, n'importe lequel, n'est pas conçu pour soutenir deux tortillas aux haricots de la largeur de ma main, une salade de pomme de terre et du guacamole sur lit de tomates à 10h du matin. Mais miracle du doggy bag, j'ai pu ramener tout ça chez moi pour avoir demain un petit déjeuner aussi copieux que celui d'aujourd'hui. Comme j'étais à Union Square, je me suis décidée à voir l'Empire State Building. Et puis comme ce n'étais pas aussi beau que ce que j'avais imaginé vu d'en bas, j'ai décidé d'y monter. Chaque fois que je vais dans un lieu extrêmement touristique comme celui-ci, j'ai l'impression de ne plus savoir qui regarde qui : les touristes sont là pour regarder, mais c'est eux pourtant qu'on parque par groupe derrière des petites barrières, à qui on dit “c'est à droite”, puis “maintenant on rentre” puis “regardez par ici d'abord, ensuite par là”, puis “pour voir un étage plus haut c'est quinze dollars” ! Ils jouent à la poupée, et sincèrement le jeu semble plus drôle de leur côté que du mien… Je ne suis pas très à l'aise quand je ne sais pas de quel côté des grilles du zoo je suis. Mais ma foi la vue est haute. Je ne dirais pas que c'est splendide, parce qu'on y voit surtout les toits, et que les concepteurs de buildings ne conçoivent par leur toit comme étant une partie passionnante de l'esthétique d'un immeuble. Mais c'est amusant, parce qu'on reconnait les immeubles, les différents squares, l'irréel central park, l'eau tout autour de la ville qu'on a tendance à oublier le reste du temps… et comme je suis là pour m'amuser, ça tombe bien.
Puis comme j'étais à l'Empire State Building j'ai décidé d'aller à Times Square. Et voilà qu'après le grandiose et le poétique je découvrais le New York acidulé. C'est coloré, ça pétille, ça laisse une impression de faux et de rigolo. Des écrans partout, des publicités qui vous font passer pour des stars, un magasin rien que pour les casquettes, un autre où il n'est question que de M&M’s… un peu plus, et on pourrait y poser les gamins pour aller au musée. Et puis comme je m'amusais beaucoup parce qu'il y a quelque chose à regarder où qu'on se tourne, je me suis acheté une place pour un show de Broadway. Comme quelqu'un de mon école m'a dit que “Memphis” était le meilleur show qui passait en ce moment, j'ai pris une place pour mercredi, et je suis impatiente de voir Times Square de nuit.
Demain c'est le Labor Day, c'est-à-dire la journée du travail. Ce qui est amusant avec cette fête c'est qu'elle a été placée en septembre pour ne pas avoir la même date que la Fête du travail en URSS, et aussi que cette année la parade du Labor day, qui se fait normalement le samedi suivant le Labor Day, n'aura pas lieu car nous serons un 11 septembre… Personnellement je trouve les fêtes américaines très dépendantes de leurs carnages… Si le 11 septembre avait été trois mois et demi plus tard, peut-être même qu'ils auraient annulé noël ! Quoique… petit calcul interne… le père noël ayant été inventé lors d'un coup marketing par Coca Cola, aujourd'hui symbole de l'Amérique à succès, peut-être que cela aurait déclenché une riposte très virulente de la fête New-yorkaise. Je vois d'ici les titres des journaux : “25 décembre 2001 : la guerre des barbus”. Pardon, je m'égare.
Du coup après tout ça je suis rentrée dans le premier métro qui me passait sous les pieds. Un géant au crâne rasé m'a avoué timidement qu'il aimait bien ma chemise parce que sa maman en portait des pareilles quand il était petit. Et puis comme une seconde après une femme déguisée en grosse peluche de Minnie (on est à Times Square, ne l'oubliez pas) est entrée dans le métro, je pense que son petit cœur d'enfant était aux anges.
Je suis donc rentrée chez moi, une grand-mère de l'immeuble m'a encore une fois appelé “Babe”, et le fait que de vieilles dames noires m'appellent “bébé” en me racontant le beau temps qu'il y a eu dans la journée m'emplit toujours de joie.
Chaque minute à New York pourrait être un roman, et chaque personne un personnage.


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